L’ail: un intérêt dans l’obésité?

20/09/2011
Article

L’ail contient de nombreux composés organo-sulfurés. L’un d’entre eux, la 1,2-vinyldithiine (1,2-DT), est une molécule lipophile résultant de la dégradation de l’allicine et que l’on trouve principalement dans les préparations à base d’ail écrasé macéré dans de l’huile. Peu de données existent sur la 1,2-DT. Outre le fait qu’elle présente des propriétés antioxydantes, la vinyldithiine pourrait avoir d’autres implications, notamment dans le traitement de l’obésité.

Comment se forme le tissu adipeux?

La prévalence de l’obésité est en constante augmentation et constitue l’une des principales causes de mort prématurée dans les pays industrialisés et les sociétés émergentes. Elle est considérée comme un facteur de risque dans le développement de troubles métaboliques et cardiovasculaires, y compris la dyslipidémie, l’insulino-résistance et l’athérosclérose.

La modulation de l’expansion de la masse grasse est donc une priorité. Dans ce contexte, la différenciation adipocytaire et l’adipogenèse sont des processus essentiels dans le développement du tissu adipeux au cours de la vie et par conséquent, dans le développement de l’obésité.

L’adipogenèse cellulaire est la transformation d’une cellule de type fibroblastique, le pré-adipocyte, en une cellule hautement spécialisée capable d’accumuler des triglycérides, l’adipocyte. La différenciation des pré-adipocytes est contrôlée par deux familles de facteurs de transcription, les facteur CCAAT/enhancer binding protein (C/EBP) et PPAR ( en particulier le facteur PPARγ).

Le facteur C/EBPβ intervevient en début de différenciation pré-adipocytaire et est nécessaire à l’expression ultérieure des facteurs de transcription adipogénique PPARγ2 et C/EBPA. Le facteur PPARγ2 est en grande partie exprimé dans le tissu adipeux et constitue le principal régulateur de l’adipocyte en induisant des processus anabolisants.

Les facteurs PPARγ2 et C/EBPA sont censés agir en synergie pour promouvoir la différenciation des pré-adipocytes. Une fois en phase terminale de différenciation, les adipocytes sécrètent des molécules adipeuses spécifiques, telles que la leptine, l’adiponectine ou encore d’autres adipokines.

Une inflammation perpétuée?

L’obésité peut être considérée comme un état inflammatoire peu intense mais chronique. Le tissu adipeux blanc de sujets obèses produit en effet de grandes quantités de facteurs inflammatoires.

Afin d’élucider les conséquences de l’accumulation de macrophages et de l’inflammation sur la biologie du tissu adipeux dans l’obésité, un laboratoire a développé une approche expérimentale utilisant des cultures primaires de pré-adipocytes humains et de macrophages.

Il a déjà été démontré que certains facteurs sécrétés par les macrophages induisent un état inflammatoire des pré-adipocytes chez l’humain, caractérisé par une sécrétion accrue de cytokines et de chimiokines.

Sur base de ces données, les experts ont alors suggéré que dans le contexte de l’obésité, les facteurs sécrétés par les macrophages accumulés induiraient un état inflammatoire pré-adipocytaire susceptible de perpétuer l’inflammation dans le tissu adipeux.

Une étude a donc été réalisée afin d’étudier les effets de la 1,2-vinyldithiine sur la différenciation des pré-adipocytes d’après l’accumulation de lipides, l’expression des gènes et des protéines de marqueurs adipeux, l’activité PPARγ de liaison à l’ADN et la sécrétion d’adipokines au sein de pré-adipocytes humains. Les chercheurs ont ensuite évalué l’ activité anti-inflammatoire potentielle de la 1,2-DT en mesurant la sécrétion de la cytokines IL-6 et de MCP-1 dans les pré-adipocytes traités avec des macrophages.

De nombreux avantages découverts

Les experts ont évalué dans un premier temps l’effet de concentrations de 1,2-DT allant de 10 μmol/L à 100μmol/L sur l’expression des marqueurs spécifiques de l’adipognenèse sur les pré-adipocytes humains. Les résultats ont permis de constater que l’expression des gènes codant pour les facteurs de transcription PPARγ2 et C/EBPA était significativement réduite dans les pré-adipocytes différenciés pour des concentrations de 100 μmol/L administrées pendant dix jours, en comparaison avec des cellules de contrôle.

De même, l’expression des gènes de la leptine, de l’adiponectine et des LPL (lipoprotéine lipase) était également réduite pour des doses de 100μmol/L d’1,2-DT. En revanche, des concentrations de 10μmol/L de cette substance n’avaient aucune influence sur l’expression génique de ces différents marqueurs. Les scientifiques ont donc décidé de concentrer l’étude sur l’effet de 100 μmol/L d’1,2-DT sur les pré-adipocytes humains.

Comme espéré, les cellules contrôles ont développé de nombreuses gouttelettes lipidiques de grande taille, alors que les pré-adipocytes ayant été soumis pendant dix jours à une concentration de 100 μmol/L de 1,2-vinyldithiine en présentaient nettement moins et de taille plus modeste. De la même façon, l’accumulation de lipides dans les pré-adipocytes était significativement moins importante dans les cellules traitées avec du 1,2-DT. Les chercheurs ont également observé une activité réduite des PPARγ lorsque les cellules étaient exposées à 100 μmol/L de la molécule au cours des dix jours de culture.

Enfin, les auteurs ont mis en évidence une diminution de l’expression des protéines PLIN dans les pré-adipocytes humains cultivés pendant la période de test avec une concentration de 100 μmol/L de 1,2-DT ainsi qu’une réduction de l’immunoréactivité pour ces protéines.

La première du genre

Cette étude est la première du genre à avoir démontré que la 1,2-vinyldithiine, substance présente dans l’ail, inhiberait la différenciation des pré-adipocytes humains et présenterait des propriétés anti-inflammatoires. Cette molécule pourrait donc être utile en tant que supplément alimentaire dans le traitement de l’obésité et des pathologies qui lui sont associées, en limitant l’expansion et l’inflammation du tissu adipeux humain.

Alexandre Dereinne

Références:

Clément K. 1,2-Vinyldithiin from Garlic Inhibits Différentiation and Inflammation of Human Preadipocytes. J. Nutr. 2009; 139: 2055-60. doi: 10.3945/ jn.109.105452




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