Flore intestinale: influence du mode de délivrance

03/06/2012
Article

La composition du microbiote à la naissance pourrait avoir des effets métaboliques importants sur le long terme, notamment sur les défenses immunitaires. Parmi les facteurs influençant la colonisation intestinale du nourrisson, le mode de délivrance est un point auquel il convient d’être très attentif.

Le fait de naître par voie naturelle ou par césarienne influence grandement la composition du microbiote intestinal à la naissance. Cette différence de flore pourrait avoir d’importantes conséquences dans la vie future du nourrisson, notamment en ce qui concerne son système immunitaire.

Différence de composition

En 2010, Biasucci et ses collaborateurs ont mené une étude dans le but d’évaluer la différence entre le microbiote au troisième jour de vie d’enfants nés par césarienne et celui des nourrissons nés par voie naturelle. Après analyse par différentes techniques, les auteurs ont découvert que la flore intestinale des enfants nés par césarienne était fondamentalement différente de ceux nés par voie vaginale: le microbiote des premiers était profondément altéré et caractérisé par une absence substantielle de bifidobactéries. De même, aucune souche de bactéroïdes n’a pu être identifiée chez les nourrissons nés par césarienne. Ces résultats s’accordaient avec ceux de Penders (2006) et de Huurre (2007). Il est donc clair que le mode de délivrance influence grandement la constitution du microbiote intestinal des nourrissons dans les premiers jours de leur vie, indépendamment du type d’alimentation.

Immunité perturbée

Les fluctuations et la stabilisation de la composition du microbiote intestinal au début de la vie se produisent de façon concomitante avec l’expansion du développement et du fonctionnement du système immunitaire muqueux. Il a été prouvé que la maturation immunitaire était directement influencée par la présence de bactéries commensales et notamment par les espèces de bifidobactéries. Ainsi, le mode de délivrance pourrait engendrer des perturbations dans le développement et la maturation de l’immunité humorale des nourrissons.

C’est ce qu’on démontré Huurre et ses collaborateurs de l’Université de Turku en 2007. Dans leur étude, ils ont évalué les différences de composition du microbiote de près de 165 enfants nés par voie naturelle ou par césarienne, ainsi que le nombre total de cellules sécrétrices d’Immunoglobulines A,d’IgG et d’IgM produites au cours de la première année de vie. Les auteurs ont mis en évidence le fait que les nourrissons nés par césarienne présentaient un nombre significativement moins élevé de bifidobactéries par rapport aux enfants nés par voie vaginale. En revanche, le nombre de cellules sécrétrices d’IgA, G et M chez les enfants nés par césarienne était plus élevé. Ces résultats suggèrent donc que chez les enfants nés par césarienne, le manque de stimulation du système immunitaire muqueux dans les premiers mois de vie par des bactéries commensales telles que les bifidobactéries, pourrait entraîner l’absence d’instauration d’un milieu tolérogénique chez l’enfant. Ce manque de tolérance immunitaire pourrait exposer le nourrisson à des risques plus élevés de développer des pathologies inflammatoires chroniques sous la forme d’allergies ou de maladies auto-immunes.

Influence sur l’asthme

Comme dit précédemment, les enfants nés par césarienne présentent une colonisation sensiblement moins importante par les Bifidobacteriae et Bacteroides. En l’absence de ces espèces commensales, les nourrissons nés par césarienne sont plus sensibles à la colonisation par des espèces pathogènes associées au risque d’asthme et d’autres réactions allergiques mais aussi à des diarrhées. Plusieurs études ont en effet démontré que les enfants nés par césarienne présentaient un profil de flore fécale perturbé dès le premier jour de leur naissance et que celui-ci le restait jusqu’à l’âge de six mois. Un essai a même rapporté un déséquilibre dans la flore intestinale d’enfants nés par césarienne jusqu’à l’âge de sept ans. Thavagnanam et ses associés ont rapporté, dans une méta-analyse réalisée en 2008, une prévalence de l’asthme 20% plus élevée chez les enfants nés par césarienne. Ces résultats sont néanmoins à prendre avec prudence car il existe une grande hétérogénéité dans les données d’études récentes menées sur le sujet.

Adapter l’alimentation

De plus en plus de preuves suggèrent donc une réelle influence du mode de délivrance sur le développement de la flore intestinale du nourrisson. Parmi les espèces cruellement diminuées chez l’enfant né par césarienne figurent les bifidobactéries et les bacteroides.

On a montré dans plusieurs études que l’alimentation peut jouer un rôle dans la modulation de la flore intestinale du nourrisson. Il est alors possible de rééquilibrer la flore de l’enfant afin de le préserver contre les risques de développer des pathologies chroniques au long cours.

En 2002 déjà, Isolauri et al. avaient réalisé une étude montrant que l’association de Bifidobacterium lactis et de Lactobacillus rhamnosus GG procurait une amélioration significative des manifestations allergiques, notamment de l’eczéma. Kalliomaki et al. avaient déjà montré un an plus tôt l’effet préventif de Lactobacillus rhamnosus GG.




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